Le 14 avril 2021, le président des Etats-Unis d’Amérique, Joe Biden, confirmait le retrait des troupes américaines d’Afghanistan après près de 20 années passées dans le pays. Deux décennies synonymes de libertés retrouvées pour les Afghans mais surtout pour les Afghanes. Accès à l’éducation, au travail, à l’entrepreneuriat… Autant d’acquis désormais plus que menacés par les talibans. 

Par Violaine Cherrier

Il y a 4 ans, j’étais conviée à assister en tant que journaliste à une conférence donnée dans les locaux de l’école Sciences Po, rue Saint Guillaume à Paris, par Rula Ghani, Première dame d’Afghanistan et ancienne élève de l’école. Fervente défenseuse des droits des femmes – elle avait même créé une chambre de commerce dédiée aux femmes -, elle présentait les nombreuses avancées qu’avait connu son pays.

Aujourd’hui, menacée directement par les talibans, elle a dû quitter précipitamment son pays avec son époux, l’ex-président afghan Ashraf Ghani, pour trouver refuge aux Emirats Arabes Unis. Elle laisse derrière elle un pays en plein chaos et surtout des centaines de milliers de femmes dans la peur.

Extraits de l’article que j’avais alors rédigé à l’époque.

Le nom des femmes

Comment exister lorsque l’on n’a même pas un nom ? Voilà à quoi ressemblait le lot quotidien des Afghanes il y a quelques années encore. Une campagne #WhereIsMyName avait ainsi été lancée sur les réseaux sociaux afghans pour que les hommes appellent les femmes par leur nom.

Alors, lorsque le 29 avril 2014, le président mentionnait son nom devant la nation Afghane, c’était la 1re fois qu’un président remerciait publiquement sa femme ! Un fait d’importance puisqu’il plaçait Rula Ghani comme une véritable partenaire du président et non une simple épouse :

« Il m’a présentée en tant que partenaire de vie mais aussi parce que j’allais jouer un rôle. C’était très important. Aujourd’hui, quand j’assiste à un évènement, je suis toujours au 1er rang à côté de mon mari. C’est essentiel car les femmes étaient jusque-là invisibles et n’ont toujours pas l’habitude que l’on donne leur nom. »

Les femmes, piliers de la reconstruction de l’Afghanistan

Rula Ghani, ex-1re dame d'AfghanistanSous l’impulsion de Rula Ghani, les femmes occupent alors une place de plus en plus importante et surtout peuvent de nouveau « exister ». Surnommée la « grand-mère » de l’Afghanistan, elle n’hésitait pas à recevoir au sein même du palais présidentiel quiconque avait besoin d’aide et souhaitait lui parler, hommes comme femmes et s’engage personnellement sur des sujets parfois complexes.

Parmi lesquels, la condition déplorable des femmes en prison. Une commission présidentielle constituée de juges, d’hommes et de femmes politiques a donc été créée pour examiner chaque dossier de femmes au cas par cas. Résultat : 300 femmes ont été libérées alors que leur peine était finie depuis quelque temps déjà. Une centaine d’autres ont vu leur peine raccourcie. Elle a également lancé une hotline dédiée aux femmes !

« Je ne suis pas là pour accorder des faveurs. En groupe, j’encourage chacune à trouver une solution propre à son problème. Je leur conseille de décider de ce qu’elles veulent faire et, moi, je serai derrière elles. En Afghanistan, les femmes agissent ! Aucune ne vient me voir pour me dire qu’elle a peur. Elles cherchent toutes des solutions concrètes comme avoir des semences pour leur ferme. »

Les femmes afghanes, porteuses de paix et d’espoir

Autre engagement actif de la part de Rula Ghani : ses actions en faveur de la paix. La situation des femmes évoluait en même temps que celle de l’Afghanistan s’améliorait ! Une évolution positive grandement liée au fait que les femmes ont pris une part active dans la reconstruction du pays.

Ainsi, lorsque l’Europe a décidé d’expulser 80 000 Afghans, c’est une femme qui est allée négocier leur retour devant les représentants européens… alors que plusieurs ministres hommes avaient refusé !

« Tout le monde veut la paix en Afghanistan. Les femmes peuvent changer la mentalité, apprendre à réconcilier, faire des compromis, écouter l’autre. » Devant l’organisation flamande Mothers of Peace, elle rappelait ainsi : « N’oublions pas les horreurs de la guerre, battons-nous pour la paix ! »

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Un combat qui était en passe d’être gagné grâce aux femmes mais qui, aujourd’hui, sonne comme un espoir perdu. Pire, les femmes sont aujourd’hui en première ligne et en danger de mort. Certaines, contraintes de rester sur place, ont brûlé leur diplôme, quitté leur bureau, caché leurs médailles, fermé leurs comptes sociaux… quand elles n’ont pas déjà disparu.

Soutenir et agir pour les Afghanes

A la vue du chaos qui règne actuellement à l’aéroport de Kaboul, plusieurs mouvements féministes ont ainsi lancé des#StandUp4AfghanWomen #feministsolidarity initiatives pour tenter de venir en aide aux femmes afghanes. Sur les réseaux sociaux notamment, les appels se sont multipliés, souvent accompagnés des hashtags #AfghanWomen, #StandUp4AfghanWomen, #feministsolidarity ou #SororitéSansFrontieres.

Des cagnottes en ligne ont également été créées. Difficile de les relayer toutes mais pour vous tenir au courant des évènements et moyens d’action, n’hésitez pas, sur les réseaux sociaux, à suivre les comptes de :

Crédits photos : cover picture – Hamza Dawar / © Violaine Cherrier

 

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