Connaissez-vous Clémence Royer ? Philosophe et scientifique, Clémence Royer est issue d’une famille catholique et légitimiste qu’elle finira par renier. C’est en travaillant comme gouvernante, dès l’âge de dix-neuf ans, qu’elle profite des bibliothèques de ses employeurs pour se former en autodidacte à la philosophie, à l’anthropologie, à la biologie et à l’économie politique. 

Par Sarah Sauquet

Quatre ans après, elle devient professeur de français en Angleterre, tout en continuant à se former. Elle traduit L’Origine des espèces de Darwin et son travail est remarqué.

Éclectique, elle touche brillamment à différents sujets, devient la première femme à être admise à la Société d’anthropologie de Paris, milite pour l’instruction des femmes et pour la philosophie populaire, et collabore à des journaux féministes. Elle est décorée de la Légion d’honneur le 17 novembre 1900.

Extrait d’Introduction à la philosophie des femmes

« Introduction à la philosophie des femmes » est un cours que Clémence Royer a donné à Lausanne, en 1859.

Dans cet extrait, Clémence Royer exprime son souhait de voir les femmes s’adonner à la science : 

Portrait de Clémence Royer« Il est fort à souhaiter que les femmes s’adonnent à la science, qu’elles s’y adonnent par plaisir, par goût, avec amour, avec philosophie enfin. [ …]

Chez les femmes, au contraire, on ne développe qu’une sensibilité maladive, sans soutien et sans frein, ou une imagination qui, sans objets rationnels d’activité, ne peut que s’égarer plus ou moins dans les créations folles des rêves poétiques. On fait abus pour elles des études littéraires, lorsqu’on fait pour elles abus d’une étude quelconque. [ …]

Il résulte de tout cela que les femmes sont tout cœur, et les hommes tout tête, et que les uns et les autres ressemblent, intellectuellement au moins, à ces images grotesques et disproportionnées que des crayons en délire nous retracent quelquefois sous prétexte de caricatures. Ceux-ci ne savent que penser, celles-là ne savent que sentir ; tous ensemble ne peuvent plus s’entendre, se comprendre mutuellement. [ …] Je dirai plus. Tant que la science demeurera exclusivement entre les mains des hommes, elle ne descendra jamais dans les profondeurs de la famille et de la société. 

[ …] Que les femmes s’emparent de la science, au contraire, et bientôt elles la rayonneront autour d’elles avec cette expansion sympathique qui distingue si essentiellement leur nature. La femme ne sait rien garder pour elles ; ce qu’elle sait, elle le dit ; ce qu’elle croit, elle le fait ; ce qu’elle a, elle le donne. »

Clémence Royer, Introduction à la philosophie des femmes, 1859

Crédit photo : Clémence Royer par Nadar

À propos de l’autrice

Professeure de lettres modernes, Sarah Sauquet est, avec sa mère ingénieure, à l’origine de six applications de littérature classique, parmi lesquelles Un texte Un jour. Intervenante lors du TedxCEWomen en 2013, Sarah est également blogueuse, autrice, et elle donne également des conférences sur les liens entre littérature et marketing. Qu’il s’agisse d’enseigner, d’écrire, ou d’animer une communauté digitale, son travail tourne autour d’un même objectif : celui de susciter l’envie de lire des classiques.